Interview : Cédric BISCAY de Shibuya International

La société fête ses 10 ans

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Comment sont nées les activités de Shibuya International ?
J’étais – et je suis toujours – un fan de jeux vidéo et de dessins animés. Ceux qui m’intéressaient provenaient du Japon. Après le bac, j’ai donc voulu aller visiter ce pays et j’ai pris une grande claque visuelle. Mais j’ai aussi vu de suite que les Japonais ne comprenaient pas les étrangers, et vice-versa. J’ai eu pourtant le sentiment de les comprendre (même si en réalité cela ne reposait sur rien en particulier). J’ai alors eu l’idée de créer une structure qui permette aux gens de mieux communiquer. J’ai créé Shibuya International après mes études, en 2002 en France (à Nice) puis quelques mois après au Japon.

Quels ont été les premiers clients ?
Ils étaient liés au monde de l’animation et du divertissement. Notre premier contrat était avec le studio Production I.G que l’on a représenté au salon Imagina. On a ensuite eu des demandes de diverses industries : banques, agroalimentaire, énergies vertes, jusqu’à devenir le cabinet de conseil de BNP Paribas sur le marché japonais.

Étonnamment, tu ne parles pas japonais. Comment est-il possible de mener de tels échanges sans comprendre la langue ?
Au départ ce n’était pas voulu : j’avais vraiment l’intention d’apprendre le japonais. Mais j’ai compris très vite que c’était en réalité un énorme avantage. Evidemment, si on cherche à travailler au Japon, il faut absolument maîtriser la langue, mais en tant qu’intermédiaire, ça donne une distance qui s’avère importante pour les relations. Entre nous, on a l’interprète qui fait tampon et qui saura préserver les intérêts de chacun. Cela donne un côté neutre à la relation. De plus, les Japonais ne sont pas forcément très tendres en rendez-vous. Je préfère ne pas comprendre ce qu’ils se disent, ça évite des réactions impulsives qui ne sont pas bonnes pour le business.

Shibuya International travaille avec Annecy. Quel est son rôle ?
Depuis 2005, nous représentons le festival d’Annecy ainsi que le MIFA au Japon. Nous avons travaillé en amont sur la venue de Leiji Matsumoto en 2011, puis cette année sur celle de Katsuhiro Ôtomo. Côté MIFA, nous avons fait venir de nombreuses sociétés : Tôei Animation depuis 2006, Tezuka Productions depuis deux ans (alors que leur présence est rare, en termes de stand), sans oublier les petits studios de Nerima.

Combien de personnes travaillent chez Shibuya International ?
Actuellement nous avons douze personnes au Japon et trois en France.

Depuis peu Shibuya a étendu ses activités à la production avec, d’abord, un court métrage sur lequel Yoshitaka Amano a travaillé. Pourquoi lui ?
J’ai beaucoup de connaissances au Japon, mais Amano est un vrai ami (il a par exemple designé les cartons d’invitation pour mon mariage !). Nous avons eu l’occasion de faire avec lui plusieurs conférences et expositions, dont une au Grimaldi Forum de Monaco. Nous travaillons ensemble depuis longtemps. Le court métrage Birth durera 3 min 30. L’animation est faite en France, par O+ studio, une structure basée à Montpellier et au Cambodge.
J’avais depuis longtemps envie de me lancer dans la production et la première personne à qui j’ai pensé, c’est lui. J’ai aussi demandé à une autre amie, Akino Arai, qui fera la musique car j’aime ce qu’elle fait. On est devenus amis suite au concert organisé en 2009 à l’Européen. On va d’ailleurs refaire des concerts ensemble en 2013. Elle sera notamment présente au salon Monaco Anime Game Show, que l’on co-organise avec les équipes du TGS (site officiel). Il y aura aussi une date sur Paris.

Quand verra-t-on Birth ?
L’animation devrait être terminée dans un mois (juillet 2012, NDR) et il faudra compter encore un mois pour mettre les musique d’Akino. Soit on le montrera en septembre, soit à la prochaine édition du Toulouse Game Show (décembre).

Mais le plus gros projet de la nouvelle branche, Shibuya Productions, c’est Windwalkers
L’idée est partie d’une envie de voir des anime aussi intéressants qu’ont pu l’être à l’époque Albator, Cobra ou Dragon Ball. J’ai rencontré Hervé Trouillet, président de Forge Animation, producteur principal. Ils ont lancé ce projet et ils sont venus nous rencontrer car ils cherchaient des partenaires japonais. En seulement trois semaines, on leur en a trouvé un : Digital Frontier. Mais j’ai aussi décidé de prendre une part active à cette production.

Digital Frontier a-t-il été difficile à convaincre ?
Le fait que Shibuya International leur présente le projet a déjà joué en notre faveur, car ils nous connaissaient déjà bien. Ensuite, ils ont adoré le scénario et, enfin, ils ont été séduits par le fait que le réalisateur soit Jan Kounen. Ils connaissaient ses films et il possède une certaine notoriété au Japon.

Prendront-ils part à la production de l’animation ?
Oui, on ne voulait pas d’un simple partenaire financier. On voulait un vrai mélange de savoir faire. Le rôle de Shibuya sera justement de coordonner ces talents et de faire en sortes qu’ils puissent travailler ensemble, même si les méthodes sont différentes. Digital Frontier est le quatrième studio au monde utilisant la motion capture, le premier en Asie, notamment concernant la “facial capture”. Voilà une de leur compétence que l’on va utiliser, par exemple.

Une date pour la sortie de Windwalkers ?
L’objectif est de rentrer en production au mois de janvier (2013) et qu’il soit terminé deux ans après.

Le financement est-il déjà trouvé ?
Oui, on n’exclue pas d’ajouter un autre partenaire de production, mais ce n’est pas nécessaire. Le film est financé en grande partie par des fonds d’investissements privés, ce qui est rarement le cas en France. Il y a aussi le CNC. On est sur un budget important : 18 millions d’euros. C’est une cible difficile qui vise le public pleinement adulte. Mais on est confiant : le livre original devrait fédérer une communauté de fans, de même que le réalisateur et la direction artistique (Marc Caro).

D’autres projets en vue pour Shibuya Productions ?
Nous avons trois autres projets de longs métrages : deux avec Forge Animation dont Abyme, adaptation d’un roman de Mathieu Gaborit, et un autre qui sera lui aussi en coproduction avec le Japon.

Remerciements à Cédric Biscay.

Retrouvez également un article sur Shibuya International et Windwalkers dans AnimeLand N°183.

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Olivier